Un article qui date de 2008 sur les gitans évangéliques. Il est toujours intéressant de voir comment des journalistes non croyants perçoivent cette communauté.
http://www.liberation.fr/monde/0101308256-l-evangile-selon-les-gitans
Voici quelques extraits. :
En pleine expansion en Espagne, le protestantisme évangélique suscite un véritable engouement auprès des «gitanos». Et favorise l’évolution des mentalités et la lutte contre les violences claniques.
«Aide-moi, Seigneur, à cheminer en
harmonie avec Ta parole. Bénis mon fils qui est plongé dans le malheur,
et attend Ta visite et la lumière de Ton esprit.» Au fond de l’église,
les bras en croix, une gitane en noir s’égosille, au bord des larmes. L’audience scande la prière aux cris de «Alléluia», «Amen», «Gloire à Toi».
Certains courbent la tête, d’autres lèvent les yeux au ciel ou étendent
la main droite avec frénésie. Les femmes sont assises sur les bancs de
gauche, très maquillées, parées de bijoux et de mantilles. Les hommes
sont placés à droite, la plupart dans d’élégants costumes noirs laissant
apparaître des chaînes en or. La musique amplifiée par une sono est
assourdissante : un chœur masculin répond à l’exubérance de chanteuses
entonnant au micro des cantiques sur des airs de flamenco, au milieu de
guitaristes, d’un batteur et d’un saxophoniste. Les gamins entrent et
sortent du temple avec une liberté totale, jouant sur des consoles, se
chamaillant ou pleurant à tout rompre. Après un quart d’heure de musique
endiablée, un prédicateur s’empare d’un micro, et assène avec force : «Mes frères, de même qu’il nous faut un passeport aux frontières, il nous en faut un pour atteindre le ciel. Méritons-le !» Nouvelle pluie d’«Alléluia» et d’«Amen».
...
Longtemps, les gitans espagnols ont été catholiques. Mais ils se
convertissent désormais massivement à la foi évangélique, en majorité au
culte pentecôtiste, comme les catholiques d’Amérique latine. Ils
seraient entre 150 000 et 200 000, soit environ un quart des gitanos d’Espagne. «Cela se marie à merveille avec leur culture, confie Mariano Blazquez, de la Ferede, la Fédération des églises protestantes. L’absence de dogme, l’accent mis sur l’Esprit saint, une dévotion exaltée…»
Le mouvement a démarré dans les années 60, un peu après les manouches en
France. Au contact du pasteur Clément le Cossec, des patriarches gitans
se convertissent et prêchent la bonne parole dans toute l’Espagne. La
contagion est spectaculaire. L’Eglise de Filadelfia est née, avec son
organisation sui generis, sa division en dix-sept zones, chacune représentée par un leader. «La
clé du succès, c’est que c’est leur Eglise, ils en sont les
protagonistes, tous les pasteurs sont gitans, analyse Jorge Fernandez,
pasteur payo. Le culte est à la fois fervent, flexible, participatif ;
et il respecte la sacro-sainte autorité des patriarches.»
...
L’échec scolaire touche 70 % des élèves gitans, 40 % de la communauté
est analphabète. Ironie : la plupart des convertis connaissent la Bible
sur le bout des doigts, au point de s’adonner à des joutes de récitation
des versets. «Globalement, affirme Alberto Bores, le culte a
été très positif pour les gitans, leur donnant un motif de fierté, et
une image enfin reluisante. Mais aujourd’hui, c’est devenu une mode chez
eux. Chez certains, cette ferveur exaltée a quelque chose d’artificiel
et de forcé.»
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